Qu’est-ce que le destin, si ce n’est ma propre création ?
Ce qui n’est pas compris se répète, tout comme une leçon s’apprend par la répétition, s’elle n’est pas intégré du premier coup. En 2009, j’avais une opération médicale pour réparer un trou dans mon tympan. À bout, désespéré de la vie, pessimiste et triste, j’avais proclamé intérieurement, juste avant d’être anesthésié « je veux mourir ». Désirant réellement ne jamais me réveiller de nouveau.
Or, ce qui devait être une opération bénigne, s’est transformé en erreur médicale. Et oui, je me suis quand même réveillé, mais complétement paralysé du côté gauche de mon visage. Impossible de bouger le sourcil, la paupière pour fermer l’œil, la moitié gauche de mes lèvres… Dans l’opération, le nerf fascial moteur, du côté gauche a été coupé.
Évidemment la dépression s’est accentuée, suite à la paralysie, même si j’ai fait plusieurs années de rééducation pour retrouver au mieux mon visage. J’ai tout de même été choqué par la probabilité entre mon vœu et cet accident. Mais, je n’avais pas encore bien compris.
J’ai souvent eu cette envie de mourir, mais jamais réellement le cran de passer à l’acte pour me suicider. Tout simplement, parce que je savais que cela n’allait rien changer à mon malheur de me suicider, puisque pour moi, la vie après la mort est bien réelle. Alors, j’errais sur Terre, comme un condamner à vivre, dans un purgatoire intérieur.
Coup du destin
« Ce qui n’est pas compris se répète. »
Jiddu Krishnamurti
Six ans, plus tard, en Inde, rebelote, malgré mes efforts et ma bonne volonté pour voir le côté positif de la vie, je suis retombé et me suis fait de nouveau absorber par mon désespoir, en nourrissant de nouveau l’envie de mourir. J’avais totalement perdu le goût de vivre, et l’envie de me détruire était bien plus forte que mon envie de vivre. Je pestais contre le Ciel de ne jamais voir la fin de ma souffrance.
Mais ma dernière heure à Bengalore ne fut pas ma dernière heure. Il était 20h, la nuit déjà tombée, et je cherchais mon bus pour partir dans le Kerala. Je me fais agressé par deux jeunes, dont l’un me menace avec un couteau sur la gorge. Ils volent juste ce que j’ai dans mes poches, mais avant de prendre la tangente, celui qui tient le couteau, m’entaille le cou. Tout ça, en moins de dix secondes bien sûr.
Je m’assois, pendant qu’une indienne me donne son écharpe pour faire pression et ralentir le saignement de la plaie. Finalement, je me dis que si je n’ai toujours pas perdu connaissance, c’est que ça ne doit pas être si grave. Je ne contrôle plus rien, je me laisse porter par la vie. Des personnes m’emmènent à l’hôpital, sur le trajet, les nids de poules m’arrachent la gueule.
Dix points de sutures plus tard, je sors de l’hôpital. La police s’occupe de moi, généreusement, ils me disent que je n’ai rien à payer, me loue une chambre d’hôtel, me ramène les médicaments. On rédige la plainte.
Accepter sa responsabilité
Au final, je n’en veux même pas à mes agresseurs, je les pardonne même, une affaire d’éducation, ils n’ont pas eu ma chance, ils sont nés en Inde et subissent la frustration projetée de la richesse occidentale.
Ce que j’ai compris de cette expérience, c’est qu’encore une fois, c’est moi-même qui l’avait attiré. Les deux jeunes n’ont été que le catalyseur d’une masse d’énergie noire que je cultivais ces derniers mois. Cette masse a éclaté lorsque je me suis fait agresser. Et je me suis senti renaître, plus léger, étrangement, dans ma confiance en la vie, j’ai senti une connexion avec le Ciel. J’ai vu que pour deux personnes qui m’avait fait du mal, plus de quarante m’avaient aidé, ce qui m’a redonné foi en l’humanité. Bref, ironiquement, cette agression a été une expérience très positive.
– Wikipedia « Jiddu Krishnamurti »